Organisation du travail en France : quels nouveaux défis pour les RH et les entreprises ?
Conseils/Bonnes pratiques

Organisation du travail en France : quels nouveaux défis pour les RH et les entreprises ?

Fin du 100% présentiel, essor du télétravail et du travail hybride, la pandémie de Covid-19 a profondément modifié l’organisation du travail en France.
Ces aménagements posent de nouvelles problématiques pour les RH comme pour l’organisation de l’entreprise plus généralement, parmi lesquelles :

– La nécessaire adaptation des SI et des outils collaboratifs
– La mise en place de systèmes de supervision et évaluation à distance des salariés
– La baisse du sentiment d’appartenance à l’entreprise et la difficulté à maintenir l’esprit d’équipe
– Les réflexions à mener sur l’indexation des salaires en fonction du coût de la vie à Paris et en Province
– La difficulté à recruter et retenir les nouveaux salariés sur le long terme

 

Autant d’effets qui poussent les entreprises à adopter de nouveaux modes de fonctionnement pour favoriser la collaboration et le bien-être au travail tout en maintenant la productivité.

 

Défi n°1 : Adapter ses outils RH, fonctionnels et collaboratifs au travail à distance

 

Selon le baromètre 2022 dévoilé par JLL, 55% de la population active travaillerait à distance au moins un jour par semaine et 80% des salariés ayant expérimenté le télétravail souhaitent pouvoir travailler à distance régulièrement.

 

Qu’il s’agisse des équipes RH elles-mêmes ou des autres salariés de l’entreprise, le travail à distance s’est démocratisé à grande vitesse lors des premiers confinements liés au Covid-19.
Désormais adopté soit à 100%, soit en mode hybride dans les entreprises françaises, un retour arrière vers du 100% présentiel paraît inenvisageable pour les salariés en mesure de télétravailler.

Dès lors, l’adaptation des outils numériques au travail à distance réalisée dans l’urgence pendant les confinements, oblige aujourd’hui à une transformation sécurisée et pérenne de ses Systèmes d’Information (SI), mais aussi des outils métier, des outils de communication et des systèmes de partage des documents et collaboration à distance.

Cette transformation est possible grâce à la technologie cloud et à l’abandon progressif des logiciels « on-premise » pour des outils parfaitement adaptés au travail à distance.

 

Défi n°2 : Superviser et évaluer les salariés à distance sans augmenter le taux de turnover

 

Selon une enquête VMWare, la démocratisation du télétravail a poussé 71 % des entreprises à chercher de nouvelles façons de mesurer la productivité de leurs collaborateurs.
Parmi les outils et mesures mis en place, on retrouve une utilisation relativement classique de surveillance des e-mails, de la navigation sur internet et des outils de collaboration.

Mais certaines mesures vont plus loin avec la mise en place par 24% de ces entreprises des systèmes de vidéosurveillance, des webcams intégrant des technologies de suivi du regard, voire des logiciels d’enregistrement de frappes au clavier.
Pour ces dernières, le turnover s’avère nettement plus élevé que pour les entreprises n’ayant pas installé ce type d’outils de surveillance à distance.

Plus globalement, le télétravail augmente le turnover en provoquant un détachement de l’entreprise et une baisse de l’intelligence collective.

 

Défi n°3 : Créer et consolider le sentiment d’appartenance à l’entreprise

 

Si 60% des salariés qui n’ont pas l’opportunité de travailler à distance aimeraient avoir la possibilité de le faire, toujours selon le baromètre JLL, on note chez les télétravailleurs une plus grande difficulté à collaborer lorsqu’ils ne se rendent pas du tout au bureau.
Repli sur soi et baisse de la création innovante font partie des effets constatés par les dernières études dans les cas de salariés en « full remote ».
Les interactions sociales se limitent parfois aux réunions de cadrage ou de production en visioconférence, aux échanges en vue de faire avancer les projets avec des collègues que l’on n’a jamais rencontré physiquement.

L’émulation de la rencontre dans un lieu physique, la connivence et l’esprit d’équipe qui peuvent naître dans la salle à café ou en salle de réunion manquent à ces liens purement professionnels.
Ainsi, selon les propos du psychologue Christophe Nguyen dans un article des Echos Entrepreneur, paru en 2021, il existe « un plus gros turnover chez les adeptes d’une forte dose de télétravail que chez les autres ».
L’article préconise de limiter le télétravail à deux ou trois jours par semaine maximum, aménagement également souhaité par les français dont les attentes vont encore majoritairement vers le présentiel avec 3,4 jours en moyenne souhaités au bureau.
Il est recommandé de réserver au bureau physique le travail collaboratif, les réunions de brainstorming et les retours d’expérience afin de stimuler l’intelligence collective et l’innovation.

A domicile, on privilégiera les tâches réclamant de l’isolement et de la concentration personnelle afin de gagner en productivité.

 

Défi n°4 : Adapter la politique salariale de l’entreprise aux nouveaux modes de travail dans le respect de la législation

 

En France il existe de fait une vraie différence de niveau de salaire et d’attentes suivant que l’on travaille à Paris ou en province.
En effet selon une étude réalisée par le site partirdeparis.fr, un salarié en province gagne en moyenne entre 16 et 20% de moins que son homologue parisien au même poste.
La raison ? Le coût de la vie et notamment des loyers souvent inférieurs.
La question peut donc se poser d’opérer une baisse de la rémunération pour les salariés en télétravail qui ont signé leur contrat à Paris mais déménagent dans une autre région.
En effet selon l’ANDRH, en 2021, 30% des DRH auraient fait face au déménagement surprise d’un de leurs collaborateurs.
En France, si une réduction de salaire imposée unilatéralement n’est pas concevable, le passage au travail à distance donne lieu à la signature d’un avenant au contrat de travail qui pourrait potentiellement prévoir une diminution de salaire.

Mais une telle proposition est risquée juridiquement car on pourrait penser qu’elle contrevient au principe d’égalité de traitement posé par le Code du Travail.
Conformément à ce principe, selon le JDN, 85% des entreprises choisissent de ne pas pratiquer de différence de rémunération entre salariés sur site et à distance.
Mieux vaut à l’heure actuelle encourager le présentiel via le remboursement des transports, ou le versement d’une prime.

Opérer une différenciation pourrait en outre contribuer à fragiliser la Marque Employeur que les nouveaux modes de travail hybrides obligent au contraire à renforcer.

 

Défi n°5 : Investir dans la Marque Employeur et modifier sa communication vis-à-vis des nouvelles recrues

 

Dans un monde du travail de plus en plus soumis aux exigences du numérique, soigner l’image de l’entreprise à l’extérieur comme un interne fait partie des actions indispensables pour les futurs recrutements.
L’attrait du télétravail pour les salariés les plus expérimentés ne doit pas faire oublier l’importance de la formation et des phases d’onboarding pour les nouveaux arrivants.
Aussi, Marque Employeur et annonces devraient-elles promouvoir les deux aspects pour ne pas faire fuir les premiers et attirer les seconds.
Une fois en place, c’est en proposant des parcours de formation à titre individuel et en entretenant la cohésion d’équipe via des réunions sur site que pourra naître le sentiment d’appartenance à l’entreprise.
Nécessaire à leur engagement, la prise en compte de l’équilibre vie pro-vie perso arrive désormais première des priorités selon le baromètre JLL de 2022.

 


Les attentes vont quant à elles vers une demande de soutien au travail hybride en termes d’équipements et d’outils  ainsi qu’à la garantie de la qualité de vie et du bien-être au travail, avant même les exigences salariales.

 

Pour conclure…

 

A l’heure des bouleversements occasionnés par l’essor du cloud et du travail à distance, l’erreur consisterait pour les entreprises à ignorer ces nouveaux besoins et changements profonds liés au travail hybride.
Le vrai challenge pour tous consiste à parvenir à la fois à garantir un bon équilibre de vie à chacun tout en consolidant l’esprit d’équipe et la performance des collaborateurs quel que soir leur mode de travail.